Le pardon de l’abandon
Août.
Tandis que l’été bat son plein,
la tiédeur, depuis peu, se maintient.
Hannah-Belle, notre jeune cuisinière,
de retour du marché,
le panier, de victuailles, bien chargé,
parcours le chemin bordé d’ombellifères.
Longeant, comme à l’accoutumée, le lavoir,
elle rentre, d’un pas décidé, au manoir.
Aujourd’hui, elle est heureuse.
Les températures sont douces,
la chaleur s’est atténuée,
et enfin, elle l’a retrouvée.
Cette vieille dame, qui,
il y a quelques années,
des pommes lui avait données.
De belles pommes, qui,
délicatement préparées,
avec des fleurs de sureau parfumées,
en de belles confitures ce sont accommodées.
Elle n’a jamais pu dignement la remercier,
ce fut pour elle un grand regret.
Car, depuis lors, jamais elle ne l’a revue,
jamais, elle ne l’a recroisée dans les rues,
elle ne restait, jusqu’alors, qu’une inconnue.
Et puis, c’est en discutant avec la boulangère,
la pipelette du coin à l’air fière,
qu’elle a découvert où elle habitait.
Dans une belle demeure en pierre,
au creux des montagnes, bien isolée.
Alors, Hannah-Belle s’en ait réjoui,
et dans son enthousiasme s’est dit,
que du pain perdu, la comblerait,
avec un peu de crème sucrée,
et des morceaux de brugnons, fraîchement coupées.
Alors, elle s’est décidée,
elle s’en est allée lui apporter,
suivant les indications qu’on lui avait données,
pour se rendre en toute sécurité,
chez cette inconnue, cette dame âgée.
Malheureusement,
une fois devant le lieu dit,
la surprise la saisie.
L’abandon, extravertie,
cette demeure a meurtri.
Aucune trace de vie ici.
Le temps semble endormi.
La joie qui emplissait la jeune femme ce matin,
a vite disparu, laissant sa place au chagrin,
devant cette demeure au sombre destin.
La peur, maintenant l’envahie.
Qu’est devenue cette vieille dame qu’elle chérie ?
Finalement, après hésitations,
et ayant passé le portail de la maison,
son coeur parvient à dominer sa raison.
Pourtant, cette peur, toujours présente,
qui, au moindre bruit, s’ébranle,
s’intensifie et l’étrangle.
Mais la curiosité l’appelle,
l’ignorance l’interpelle.
Elle frappe, rien ne se passe,
le silence la trépasse.
Elle tremble,
elle entre.
L’intérieur, sombre,
laisse entrevoir des décombres.
La poussière en une couche épaisse,
dans chacune des pièces,
s’est longuement déposée,
sur tous ces meubles, délaissés.
Même les fleurs, de ci de là parsemées,
patiemment, s’y sont desséchées.
Dans la cuisine,
une scène sibylline.
Le temps s’y est arrêté,
une tasse de thé y était dégustée,
un miroir posé à ses côtés,
et une lettre fut rédigée.
Elle est là, poussiéreuse,
cachetée et miséreuse,
attendant son heure, glorieuse.
Hannah-Belle, s’en saisie,
et d’une traite la lit.
À la lecture de ces mots, courageux,
Les larmes, sans retenue, lui viennent au yeux.
La vieille dame, dans un dernier moment passé ici,
de sa main tremblante et en ces termes écrit :
« Etranger, étrangère,
si, aujourd’hui, tu lis cette lettre,
c’est probablement que désormais,
je ne suis plus.
La vie a repris ses droits,
tout comme elle sait si bien nous les donner.
À toi, que je ne connais pas,
laisse moi te raconter mes secrets,
mes non-dits, mon récit.
Non pas qu’il soit exceptionnel,
bien au contraire…
non, en fait, il se trouve bien trop ordinaire.
Mais justement !
Faut-il en être oublié pour autant ?
Faut-il en conséquence tomber dans l’oubli ?
C’est parce qu’il est bien trop ordinaire,
qu’il mérite finalement d’être raconté.
Les choses doivent être dites. Simplement.
Car peut-être que par ce message,
toi, étranger ou étrangère,
tu éviteras les erreurs que j’ai pu faire.
Peut-être ne te laisseras-tu pas berner.
Par ce temps qui passe, trop vite.
Par cette vie qui laisse des traces, trop vives.
Par la douleur qui nous emporte, avide,
Et par nos cœurs qui s’assombrissent, trop vides.
Alors, laisse moi te raconter,
en toute simplicité,
la triste vie d’une dame âgée,
qui,
par la vie, sans arrêts,
fut bien trop de fois abandonnée.
Car oui, l’abandon, à n’en pas douté,
fut le mettre mot de mon existence passée.
Je n’avais que 5 ans quand pour la première fois,
ce sentiment, au plus profond de moi,
sans crier gare, s’est imposé.
Mes parents, prématurément décédés,
m’ont laissé derrière eux, seule, à les pleurer.
Alors, mon cœur s’est forgé,
une barrière s’est dressée,
la glace s’est engouffrée.
Un vide s’est installé,
Une souffrance, perpétuellement, m’oppressait.
J’ai du affronter la vie,
mais aussi les autres.
J’ai maudis leur pitié,
j‘appréhendais leurs incompréhensions,
et je pleurais leurs jugements.
Car la différence effraie.
Et différente, je l’étais.
Solitaire,
introvertie,
hypersensible,
taiseuse,
dans la lune,
effacée,
réservée.
Je ne me sentais pas concernée par le monde qui m’entourait,
et cela même me dépassait.
Mes préoccupations étaient ailleurs.
Je voulais me sentir aimée.
Que l’on arrête de m‘ignorer,
que l’on m’apprécie pour qui j’étais,
et que l’on a arrête de s’effrayer,
d’une pauvre fille inaccoutumée.
Ma vie d’adulte fut ensuite bouleversée,
par la perte insoupçonnée,
de mon fils unique, engagé dans l’armée,
y ayant laissé la vie, à 21 ans passé.
J’ai du affronter la perte d’un enfant, terrassée.
Alors j’ai moi-même voulu abandonnée,
laisser cette vie derrière mon âme damnée,
stopper les souffrances à jamais,
et m’endormir pour l’éternité.
Mais mon mari, lui, encore demeurait.
A cette idée, je me suis accrochée,
Je ne pouvais le délaisser,
à son chagrin, je ne pouvais le livrer,
pour notre amour, je me suis relevée.
Puis les années ont passé,
avec la vie, nous avons renoué,
et de notre exploitation de pommes l’on vivait.
Puis lui aussi s’en est allé,
la maladie l’ayant emporté,
me laissant seule,
abandonnée,
des idées noires, à ressasser.
Mais j’ai résisté, je l’ai vaincu,
cette vie sans issue,
qui bien des fois m’a déçu.
Je l’ai fièrement vaincu,
en mémoire de tous ceux que j’ai perdu.
Jusqu’au bout j’aurai vécu.
Aujourd’hui, c’est à l’article de la mort,
que ces derniers mots j’élabore,
pour témoigner de mes ressentis,
sur cette vie qui m’a meurtri,
mais aussi, qui m’a appris.
Aujourd’hui, c’est fièrement que je meurs,
car j’ai décidé d’en faire un moment de bonheur.
Car, malgré la différence,
et malgré les souffrances,
toujours, je me suis battue.
Aujourd’hui, je me salue.
car demain n’existe plus.
Je m’honore, la tête haute,
d’avoir su me relever, sans faute.
La vie, durant mon existence, m’a tout pris,
et de chagrin m’a envahit.
Mais aujourd’hui, je reste libre de ma mort,
je pars heureuse et sans remords.
Ainsi, la douleur, enfin, s’éteint,
et le chagrin, réellement prend fin.
Alors étranger, étrangère,
ne retient de cette histoire,
que toi seule décide de ton chemin.
L’ombre ou la lumière ?
Que désires-tu ???
Ta vie t’appartient,
même si parfois, elle dérape d’un rien.
La souffrance tu connaîtras,
les douleurs tu endureras,
la lassitude tu déploreras,
et l’abandon tu pleureras.
Mais fais de tout cela une force,
tires-en les éléments qui te renforcent,
et bats-toi, jusqu’au bout,
et surtout, surtout…
ne lâche rien, jamais.
Ne te laisse pas submerger.
Toi seul décide de te laisser sombrer,
ou bien alors de te sauver.
La vie nous endurcie,
il t’appartient de l’accueillir,
et de survivre,
ou de la fuir,
et de mourir.
Maintenant, toi qui me lis,
vas, autant que tu le peux, vis,
et surtout, n’oublie pas d’être heureux.
Sur la douleur, ferme les yeux.
Aussi, je souhaite,
qu’aussitôt la lecture achevée de la cette lettre,
tu t’éloignes d’ici, sans autre idée en tête,
que de faire vivre au fond de toi, mon souvenir honnête.
Mon corps repose dans cette demeure,
et il y restera, je l’espère, de longues heures.
Mon voeu est de rester dans ce tombeau,
et reposer en paix, toute l’éternité s’il le faut.
Alors, Adieu !, étranger, étrangère.
Je m’endors en songeant à toi,
à ma vie passée et à ma victoire.
Bien à toi mon ami(e).
Améliane. »
Désormais, les larmes coulent.
Hannah-Belle, touchée,
est, certes, attristée,
par la mort de cette âme choyée,
mais, surtout, elle se sent soulagée.
Soulagée, qu’Améliane, libérée,
finalement heureuse s’en soit allée.
Enfin, plus claire la situation lui apparaît.
La désolation, qui, dans la maison, règne,
est à l’image de sa vie passée.
L’abandon, encore une fois, a frappé,
et sa venue, était, de fait, inespérée.
N’est-ce pas là une belle synchronicité,
que par instinct, du pain perdu elle soit venue lui apporter ?
Ce pain que l’on pensait passé,
rassi,
qu’elle aurait pu jeter,
aussi,
mais qui, en un délicieux met,
finalement, ravit.
La belle métaphore que voilà.
Elle opte donc pour le laisser là,
en offrande, pour reposer dans ce tombeau,
aux côtés de cette âme partie en lambeaux.
Alors, elle quitte finalement les locaux,
sereine et satisfaite de son dépôt.
Hannah-Belle, emportant cette lettre,
s’en va, acquitter de sa dette,
le coeur serré mais avec l’idée en tête
d’affronter la vie et les peines qui la guettent,
pour vivre pleinement et honorer son être,
pour éviter qu’un jour, encore, elle ne regrette.
Pain perdu et crème mascarpone aux brugnons
ingrédientsLe pain perdu1 baguette rassie (mais pas trop non plus)
4 œufs
4 cas de miel (ici acacia)
350 ml de crème de coco épaisse
1 pincée de sel
10 ml arôme de vanille liquide
La crème150 g mascarpone
3 cas de miel (ici acacia)
50 g crème de coco épaisse
Dressage2 brugnons
un peu de miel liquide
quelques myrtilles fraîches ou surgelées
|
méthodeLe pain perdu1 Couper le pain en tranches ni trop fines ni trop épaisses.
2. Dans un saladier, mélanger les œufs, le miel, la crème de coco, la vanille et le sel.
3. Verser le mélange dans un plat (type plat à lasagnes) puis faire tremper les tranches de pain jusqu’à ce qu’elles soient suffisamment imbibées. Les retourner régulièrement.
4. Faire chauffer un peu d’huile d’olive dans une poêle.
5. Dorer les tranches de pain à feu moyen. Les retourner sur l’autre côté pour qu’ils dorent bien de chaque côté. Répéter l’opération jusqu’à épuisement des ingrédients.
La crème1. Pendant la cuisson du pain perdu, préparer la crème au mascarpone.
2. Pour cela, mélanger tous les ingrédients.
3. Réserver au frais.
Dressage1. Laver les brugnons et les couper en lamelles.
2. Mixer quelques myrtilles ou des murs pour en faire un coulis.
3. Disposer une tranche de pain perdu dans une assiette, disposer un peu de crème et un peu de coulis par dessus. Touiller légèrement avec la pointe d’un couteau.
4. Enfin, disposer quelques tranches de brugnons et parsemer le tout avec un peu de miel liquide.
5. Servir de suite.
|
Les producteurs locaux de la recette :
GAEC Félix (Saint-Avit-Saint-Nazaire, Gironde) pour les brugnons.
Boulangerie 100% BIO Laurent Lachenal (Bordeaux, Gironde) pour le pain.
La Butinerie de Moulié (Soustons, Landes) pour le miel d’acacia.
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Cosmic Sam says
13 septembre 2018 at 08:38Une magnifique mise en scène comme toujours!
La Faim Est Proche says
13 septembre 2018 at 14:11Merci infiniment pour ce retour ! Je suis ravie que cela te plaise ! =)
La Faim Est Proche says
20 septembre 2018 at 11:50Merci, vraiment ! ❤️